16-02-2023
Comment rester visible sur Twitter ? Get reach or die tryin’
- Média
Analyse par Marc L’Helgoualc’h, notre expert social media.
Fin décembre 2022, Twitter a développé une nouvelle fonctionnalité qui permet à tous les utilisateurs de voir le nombre d'impressions d'un tweet. Si cette fonctionnalité est intéressante pour mesurer la viralité d'un tweet, elle a surtout mis en lumière la très faible visibilité moyenne des tweets. Ironie du sort, même Elon Musk s'est plaint de la (relative) faible visibilité de ses tweets alors qu'il est suivi par près de 130 millions d'utilisateurs.
À vrai dire, la visibilité réduite des tweets, en chute libre de 2018, était déjà connue des social media managers. Elle éclate maintenant au grand jour et montre les limites de la communication sur ce réseau : à quoi bon tweeter si personne ne le voit, y compris mes abonnés ?
La baisse de visibilité des tweets est encore plus violente pour les comptes d'institutions publiques, d'entreprises ou de think tanks habitués à publier des tweets avant tout informatifs : annonce d'événements ou de colloques, curation d'articles et d'expertises. De l'information plutôt factuelle sans prise de position tranchée. Or la logique algorithmique (et donc éditoriale) privilégie de moins en moins le relais d'informations factuelles, en dehors des breaking news. Pourquoi cela ? Pour quelles finalités ?
Par extension, on peut se poser la question : comment une institution publique ou une entreprise peut-elle rester visible sans avoir recours à de l'achat média ?
From FOMO to Mofo very quickly
Un peu d'histoire : jusqu'en février 2016, il n'y avait pas d'algorithme sur Twitter. L’utilisateur voyait sur son fil les derniers messages de ses abonnements, de manière antéchronologique. Aucun compte n'était mis en avant par rapport à un autre, comme c'était le cas sur Facebook et Instagram. Un problème selon les dirigeants (plutôt les actionnaires) de Twitter selon lesquels l'utilisateur a une forte probabilité de rater de nombreux tweets pourtant intéressants. Le fameux FOMO (« fear of missing out »). Twitter a progressivement développé un algorithme qui mettait en avant, entre deux connexions de l'utilisateurs, quelques tweets "que vous auriez pu manquer", sélectionnés selon des critères opaques (théoriquement selon l'engagement du tweet, c'est-à-dire le nombre de likes, retweets, clics ou commentaires). À l'époque, des utilisateurs mécontents de ce changement majeur (LE tournant de Twitter) s'étaient exprimés avec le hashtag #RIPtwitter. Pendant plusieurs mois, les développeurs de Twitter ont expérimenté et affiné l'algorithme. Il était même possible pour l'utilisateur de refuser cet algorithme et de conserver un fil 100% antéchronologique (une solution, peu mise en avant, choisie par... moins de 2% des utilisateurs). L'algorithme devint donc le cœur de Twitter. Pour améliorer l'expérience utilisateurs ? À voir. Surtout pour suivre la logique déjà déployée par Facebook et Instagram : développer un algorithme, c'est l'assurance de réduire sciemment la visibilité moyenne des publications pour inciter les annonceurs à recourir à de l'achat média.
En 2018, Twitter dégage donc des bénéfices pour la première fois de son histoire... Victoire. Les actionnaires sont contents. Les développeurs ont bien travaillé pour faire de Twitter un Facebook bis, avec un feed rempli de tweets sponsorisés et de "recommandations" complètement foireuses. Et une visibilité quasi nulle des comptes auxquels on est pourtant abonnés. L'argument du « fear of missing out » a dévoilé sa nature essentiellement pécuniaire. From FOMO to Mofo (motherf*cker) very quickly... Mais peut-on reprocher à une entreprise privée de vouloir dégager des profits ?
Pour avoir animé une bonne trentaine de comptes Twitter ces dernières années, le constat est clair : la visibilité moyenne d'un tweet a été divisée par 4 ou 5 depuis 2017. Et cette visibilité s'est encore réduite depuis le rachat de la plateforme par Elon Musk en octobre 2022 et le développement de l'offre payante Twitter Blue.
Qu'est-ce qui est visible sur Twitter ?
On parle ici de la visibilité en déclin de manière globale. Les tweets viraux et largement partagés ne manquent pourtant pas. Mais ils appartiennent à des catégories ou des tendances bien spécifiques : le divertissement et la pop culture, la vie amoureuse de Leonardo di Caprio, la K-pop ou les breaking news (dont les sources originelles sont souvent pillées par des voleurs de contenus comme Mediavenir ou Cerfia en France)... et surtout l'humour ou les messages péremptoires et clivants. D'où la visibilité fulgurante de tweets consacrés à des micro-phénomènes sociétaux mais mis en avant par les multiples réactions épidermiques de militants, de rageux ou de trolls.
Nous assistons à l'avènement d'un Twitter qui se 4chan-ise, qui se forum-18-25-ise... Avec une radicalisation de prises de parole atomisées où des micro-communautés ne cherchent ni à informer ni à convaincre mais à marteler un point de vue. Avec plus ou moins de violence, de mauvaise foi et d’humour trash.
Cette logique n'est pas nouvelle mais elle s'est amplifiée ces dernières années. Dès la fin des années 2000, quand Dailymotion concurrençait encore Youtube, on a vu apparaître les premières compilations de bons clients de la télévision, c'est-à-dire prompts à "pousser un coup de gueule" : une féroce lutte des clashes avec des extraits souvent issus des émissions animées par le comique Laurent Ruquier. Humour et colère. Les deux mamelles du non-débat public étaient déjà réunies. Car c'est bien dans les médias grand public traditionnels que cette tendance a émergé. Notamment la radio avec ce qu'on appelle les émissions d'opinion axées sur la parole des auditeurs. RMC s'en est fait la spécialiste dès le milieu des années 2000 avec les Grandes Gueules et son ambiance de salle de boxe Éco+ où des chroniqueurs et des auditeurs, spécialistes d'aucun sujet en particulier, rivalisent d'imagination pour créer le plus fort en assénant des demi-vérités. On retrouve cet "esprit" aujourd'hui dans des émissions comme TPMP ou l'Heure des Pros avec ses chroniqueurs aux attitudes de télévangélistes. Ou comment passer de l'hilarité à la peur en quelques secondes.
Au-dessus de cette mêlée : les cyniques et les blasés de la publicité et de la comm’ qui s’amusent, de la crédulité et de l’impulsivité des utilisateurs des réseaux sociaux. D'où l'essor des médias et profils parodiques.
Twitter a repris ce principe pour substituer à sa logique d'information en temps réel celle d'un débat d'opinions. L'algorithme agit en ce sens, en amplifiant la visibilité des positions les plus clivantes et provocatrices - promptes à recevoir commentaires, likes ou retweets. Cercle pervers : les utilisateurs en mal de reconnaissance ou de visibilité (le tout à l'ego contemporain) publient sciemment des messages clivants pour espérer "percer". Vanitas Vanitatum.
Que faire ?
Pour notre question du jour : que faire pour rester visible sur Twitter, surtout pour une institution ou une entreprise qui souhaite juste relayer des informations auprès de ses abonnés ? Comment toucher au moins 5% de ses soit-disants abonnés ? Voici cinq conseils :
- Payer. Pour citer Dante : "abandonnez tout espoir vous qui entrez ici". La plateforme Ads Twitter est pour vous. Vous pourrez sponsoriser vos vidéos, vos annonces d'événements ou des relais d'articles.
- Faire des partenariats. Dans la même logique payante, vous pouvez nouer des partenariats avec des experts ou influenceurs de votre domaine pour co-créer du contenu (par exemple un podcast ou une revue de presse) ou dynamiser une campagne.
- Être clivant / marrant (ou les deux). Si vous utilisez la logique de l'algorithme, vous serez visibles... mais pour dire quoi exactement ? Tout le monde ne peut pas être aussi cynique que les comptes de paris sportifs et rire à gorge déployée d'une addiction.
- Interagir avec l'écosystème. Vos tweets sont tellement peu vus que si vous axez une partie de votre communication à répondre aux tweets d'experts de vos thématiques, vous avez plus de chance d'être visible. S'il y a un aspect que l'on ne peut pas enlever de Twitter jusqu'à présent, c'est bien sa dimension conversationnelle. Quand elle n'est pas ternie par les trolls.
- Motiver ses collaborateurs pour communiquer. Si l'opinion et la réaction sont la norme sur Twitter, l'information neutre, la pédagogie ou l'analyse sont-elles mortes ? Non. La parole experte a encore droit de citer et reste audible... si elle est portée par une personne et pas une institution ou une entreprise ! Le collaborateur est un porte-voix efficace : la portée de ses messages sur les médias sociaux est 8 fois plus virale que celle de l’entreprise. Des messages incarnés, voilà ce qu'il faut.
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