Qui a dit que Spotify, ce n’était que de la musique ? Depuis 2020, Claire Hazan s’occupe des podcasts et des productions originales de la plateforme pour la France et le Benelux. Elle incarne mieux que quiconque le choix de Spotify de recruter des équipes locales, pour des productions locales au plus près des besoins des auditeurs. Ancienne responsable des podcasts chez Europe 1, Claire Hazan a monté une programmation éclectique en réunissant des personnalités (Tony Parker, Lena Situations, Lauren Bastide), des médias qui s’essayent au podcast (Le Monde, AFP) et des jeunes talents prometteurs (à l’image du podcast à succès “Coming out”). Spotify est devenu un vrai média, et sa podcasteuse en chef est à suivre de près.

Pourquoi des internautes sont-ils persuadés que les oiseaux n’existent pas ? Qu’est-ce que le Listenbourg, ce faux pays qui électrise les réseaux ? Le nouveau média Spotters prend très au sérieux les mèmes et les tendances sur Internet et les décrypte avec talent. Ses threads Twitter sont devenus une référence pour les mordus de culture web, qui veulent rester à jour, mais le média se déploie aussi sur Insta, YouTube, TikTok, Medium et LinkedIn. Aux manettes, le brillant Axel Beaussart, par ailleurs social creative strategist au sein de l’agence Hungry and Foolish. Spotters est devenue une vraie entreprise et a embauché deux rédactrices. Un modèle de ces nouveaux pure-players des réseaux qui s’épanouissent en marge des médias.

Après trois ans de bons et loyaux services pandémiques, Guillaume Rozier a été recruté par l’Elysée, où il apportera son expertise de la data et des politiques publiques. Rien de surprenant, tant le parcours du jeune ingénieur en informatique transpire le sens du service public. Il est le créateur de CovidTracker, le site référence des fondus de datas Covid, et de ViteMaDose, un service qui s’est imposé comme une indispensable béquille au déploiement de la campagne vaccinale. C’était finalement une incongruité qu’il ne travaille pas au service de l'Etat, c’est désormais chose faite. Son nouveau défi, sous les ors de la République : rendre intelligibles les données de la crise énergétique.

Sans elle, qui sait si Guillaume Rozier aurait eu le même destin ? Depuis son poste de déléguée ministérielle au Numérique en Santé, Laure Letourneau a piloté le lancement de SI-DEP, un sigle peu connu du grand public mais qui a joué un rôle essentiel lors de la pandémie. La France était à la pointe des datas Covid grâce à ce système d'information faisant remonter en temps réel les tests Covid et dont les données étaient publiées en open-data, faisant le régal de Guillaume Rozier. Pourquoi elle comptera en 2023 ? Laure Letourneau vient d’être nommée par Matignon à la transformation numérique de la planification écologique. Une lettre de mission ambitieuse pour la femme qui monte dans les coulisses de l’Etat. Elle est également la co-autrice du livre “Ubérisons l’État ! Avant que d’autres ne s’en chargent” publié en 2017. On peut dire qu’elle a suivi à la lettre son appel.

“Le Collimateur” parlait des sujets de défense et de géostratégie bien avant que Vladimir Poutine ne lance ses chars sur Kiev et que les épidémiologistes du dimanche ne se reconvertissent en stratèges des champs de bataille. L’audience du podcast, tenu de main de maître par l’historien Alexandre Jubelin, a monté en flèche portée par une actualité bouillonnante et un intérêt grandissant du public : 2,5 millions d’auditeurs en 2022. Son entretien du général Michel Yakovleff consacré aux contre-performances de l’armée russe est déjà un classique. Ce programme est un petit miracle : un contenu pointu mais accessible, avec un ton très libre et une programmation musicale détonante, malgré une tutelle qu’on pourrait imaginer pesante (l’IRSEM rattachée au ministère des Armées). Une leçon pour les administrations publiques : parfois, il faut simplement faire confiance aux talents.

L’écosystème de l’information est tant pollué par les fake news qu’une jeune génération de journalistes se consacre uniquement à son éradication. Figure emblématique de cette génération “fact-checkers”, Aude Favre est sur tous les fronts : avec son documentaire "Fake news, la machine à fric", sa chaîne Youtube où elle évangélise la jeunesse, son Discord, son projet “Citizen Facts” avec Arte, son association “Fake off”. On l’a même vu siéger au sein de la prestigieuse commission Bronner chargée de faire des propositions contre la désinformation. Spoiler alert : en matière de fake news, Aude Favre risque bien d’avoir encore du boulot en 2023 !

La crypto et les NFT ont mordu la poussière en 2022 et les doutes grandissent chaque jour un peu plus autour de l’éco-système. Il peut donc être étonnant de miser pour 2023 sur un média spécialisé dans ce domaine. Ce serait mal connaître The Big Whale, cofondé par Grégory Raymond, ancien journaliste à Capital. Loin des compromissions de certains, le site propose une information indépendante qui n’a pas peur d’affronter les questions qui fâchent (et s’il y a bien un secteur où il y en a, c’est celui-ci). The Big Whale a réussi à imposer sa marque en à peine 8 mois, à conquérir 15.000 abonnés payants et à trouver des pistes innovantes de financement : leur collection de NFT a été sold out en à peine une heure !

Mamadou Dembelé est parti de ce constat simple : les médias traditionnels ont une forte propension à privilégier les informations négatives et les mauvaises nouvelles. Résultat : on passe souvent à côté de l’essentiel. ”L’urgence climatique, les enjeux sociaux et sociétaux sont aujourd’hui de plus en plus abordés mais on se penche trop rarement du côté des solutions”, regrette-t-il. Pour y remédier, ce jeune investisseur en capital-risque a créé son propre média sur les réseaux, The Impact Story. Sur Insta et TikTok, il part en rencontre des entrepreneur.e.s et start-ups qui ont un impact positif environnemental et/ou social. Voilà une belle histoire positive comme les affectionne Mamadou Dembelé : les médias ne nous satisfont pas complètement ? Aucun souci, créons notre propre média !

La crise de l'immobilier est si profonde que toutes les initiatives, y compris les plus disruptives, sont les bienvenues. La start-up Virgil met sur la table 100.000 euros pour aider les 25-40 ans à acquérir un bien immobilier. Ce n’est pas un prêt : Virgil possède ensuite une partie du capital et ne se rémunère que lors d’une éventuelle revente. Une solution innovante imaginée par Saskia Fiszel et son cofondateur : “D’un côté, Virgil permet aux jeunes actifs de devenir propriétaires. De l’autre, il permet aux investisseurs d’avoir accès à un actif très recherché — l’immobilier résidentiel — en créant un impact sociétal éminemment positif”, explique-t-elle. La start-up a récemment levé 15 millions d’euros, une somme qui permettra de développer le projet au-delà de Paris, dans les grandes villes françaises et à l’étranger.

Étudiante à l’école 42, Amy Plant s’est fait connaître par ses vidéos consacrées au code, cools et didactiques, reprenant à merveille les codes de YouTube : “J’ai hacké une webcam”, “Je fais coder ma mamie de 82 ans”, “J’ai craqué l’algorithme de YouTube”. Le ton est si détonant dans le paysage du code que la jeune femme a eu les honneurs d’une longue interview dans un podcast de France Inter. Mais pourquoi ce milieu reste si masculin ? “Je pense que c’est un écart qui commence et se creuse très tôt, dès l’école primaire”, regrette Amy Plant. “C’est une question d’image”, ajoute-t-elle. S’il y a bien une personne qui peut changer cela et rendre le code plus attrayant, c’est bien elle.

Qu’est-ce que la donut economy ? Comment ranger son frigo comme Bree Van de Kamp ? Comment préparer la parfaite soupe froide au basilic ? La newsletter Le Filtre - anciennement Stay Hungry - cultive un délicieux éclectisme, entre décryptages, idées et recettes. Telle une autrice, la cofondatrice Adèle Benoit a lu avec passion ses meilleurs articles lors de la dernière édition de Médias sur Seine. Avec d’autres, elle incarne cette nouvelle génération d’éditeurs, qui parie sans complexe sur la newsletter et qui est en train, l’air de rien, de bousculer la presse traditionnelle.

“Quiz personnages historiques”, “qui suis-je spécial pays ?”, “je t’explique 3 punchlines de rap aux références historiques”. Sur son TikTok aux 1,8 million d’abonnés, César Roussel marie avec brio la culture générale et l’aspect ludique. Le succès est au rendez-vous et l’étudiant en école de commerce ne se cantonne pas aux réseaux sociaux : il a publié un livre avec ses meilleures anecdotes et même un jeu de société. Son job ? Diriger un “média de culture G”, comme il le présente. Comment lui donner tort alors qu’il a deux fois plus d’abonnés que Le Monde sur TikTok ?